La géographie n'a plus de raison d'être, les frontières ne sont plus tangibles à la lumière de l'art. Métissages, échanges et influences font et défont les épicentres, les terreaux. Encore plus maintenant, Internet est passé par là, une certaine désinvolture aussi. Respectons les ainés mais affranchissons-nous des codes, du je-suis-ici alors je-joue-cela. La musique est un agrégat d'influences et de découvertes, d'autant plus pour qui possède l'esprit ou les pieds vagabonds. Europe pour les pieds et son histoire, États-Unis pour les notes et son Histoire, Mathis Haug rentre aisément dans cette catégorie. Un troubadour version 2.0, période bleue. Le blues car cette musique le suit ou alors est-ce lui qui l'a percutée depuis bien longtemps. Connu notamment avec ses potes de Mathematics, puis reconnu sur son premier album solo, Playing my dues, Mathis Haug nous revient avec un album de 12 titres, Distance. Cette distance, qu'elle soit temporelle ou métrique, il s'en abstient, vu qu'il traverse le blues sur ses décennies et ses territoires. Pour l'accompagner dans ce voyage, si loin, si proche, de fins limiers et leurs nombreux instruments. D'abord Jean-jacques Milteau, producteur de l'album et grand harmoniciste, mais aussi Stephan Notari (percussions, guitare acoustique, piano), Benoit Rapetti (basse, contrebasse), Celine Bonacina (saxophone) et Mike Lattrell (tuba, mandoline, orgue). Authenticité et sincérité dans le jeu et les mots, dans les notes et la voix, on traverse les plaines du sud (Sad and lonesome day blues) jusqu'au nord et les paysages de Neil Young (Poodle dog), les bayous de Dr John (Cannibal dancer) jusqu'aux églises de Chicago (Is Jesus on my side). Et sa musique s'échappe des règles, comme sa voix échappe un léger timbre broussailleux, c'est aussi en cela que Distance est authentique et donc singulier. D'abord le timbre de Mathis s'accorde quelques écarts, tutoyant les aigus dans un univers loufoque à la Tom Waits (The clown) et la douceur dans une pop-fleurette (Song for my brunette), ensuite les musiciens et leur extension s'invitent élégamment dans des contrées qui ne sont pas les leurs, le saxo langoureux dans un blues sanguin (Hearthbreaker), une rythmique jazzy dans un morceau vivifiant (Wise advice), l'harmonica et le tuba dans un morceau Gospel. Les kilomètres s'enchainent dans ce vaste pays, Mathis Haug nous apprend à les avaler avec une certaine délectation.
Mr Blue
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