Sortir des conventions, provoquer les sens, s'affranchir des codes, proposer un chemin tiers. Tâche ardue, tant la frontière est ténue entre l'incompréhension et l'émotion. Beaucoup s'y essayent, peu en passent le cap, restant sur le quai du phénomène de foire ou du buzz. Prenons un exemple, au hasard David Lynch. Surréaliste dans son approche, déroutant souvent, explorant la nature humaine sur toutes ses palettes-des névroses au merveilleux-le réalisateur mais également musicien et photographe, a toujours eu comme point d'orgue dans ses productions un onirisme latent et un haut degré de méticulosité, par l'image et par le son. Certains musiciens ont poursuivi ces chimères. Du rock progressif des Pink floyd, à celui expérimental de Radiohead, du faussement brouillon free jazz, au maelström résonnant shoegaze, la musique est un art brut qui se suffit à elle-même autant qu'elle se façonne absolument, qui s'écoute dans son épure comme dans les méandres des arrangements. Au final seule l'émotion doit primer. Ce jeu entre celui qui crée et celui qui reçoit, est comme le sentiment amoureux, insondable si on n'en perçoit pas les codes ou si on ne donne pas quelques clés pour les déchiffrer. Sublimer l'émotion dans la complexité. Les français de Figures, sur leur premier EP Cycle, ont pris ce pari un peu fou, assurément minutieux. Normal quand on lit qu'ils sont fans de Radiohead, d'Archive ou encore de Björk pour les plus marquants d'entre eux. Le parallèle évident avec le groupe de Yorke s'entend autant dans la voix de Mickaël Menu (Sleep disorder) que dans la proportion du trio à triturer et superposer les sons, à nous perdre dans des mirages auditifs, à jouer sur les orchestrations, les déconstruire pour les sublimer à leur sauce partition rock (Seeping nest) et sensibilité folk (Infinite loop), transe ambient (Landcsape) et variation électro-bruitiste (Shoegaze). Cycle est bien leur oeuvre, un peu leur monstre Frankenstein, un être hybride pas si freaky que cela où ils ont insufflé leurs convictions et venu à la vie contre toute forme de logique, un peu John Merrick aussi, offert à la face du monde, chacun n'y voyant que s'il ne veut en percevoir, monstruosité et inconvenance pour certains, âme pure et mélancolique pour d'autres. Et vous, que ressentez-vous...au propre comme au figuré ?
Mr Blue
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